Témoignages d’accompagnants

Paroles de bénévoles : l’accompagnement dans le quotidien

  • Quand je me prépare pour me rendre à l’hôpital, c’est un sourire intérieur qui vient. Je me sens compagnon/compagne de celui qui est en fin de vie. J’espère qu’un jour, quand ce sera mon tour, quelqu’un prendra aussi soin de moi.
  • Je reste attentive aux demandes des patients et de leurs proches. Dans la mesure du possible et selon l’ouverture laissée par le patient, j’évoque la fin de vie. Ceci est plus facile à domicile car nous avons un autre lien, bâti sur la durée.
  • Chacune de mes interventions à l’USP est un moment nouveau dans lequel je dois me re-situer, rien n’est définitivement acquis.
  • Je ne suis pas dupe, je reçois beaucoup tout en donnant beaucoup. J’ai sûrement quelques chose en moi à réparer et c’est cette faille qui me rend plus humain. Je donne et accepte de recevoir, c’est dans cet esprit que je rencontre les personnes.
  • Que ce soit avec les patients ou les familles, j’essaie d’être dans l’accueil de l’imprévu avec simplicité.
  • Nous sommes dans une pratique d’amour, nous accompagnons un monde différent du nôtre dans le respect, l’écoute, le don fraternel, nous sommes appelé à partager l’essentiel du patient dans une relation à deux très intime.
  • Le service a une odeur particulière et j’aime me retrouver là. Je m’y sens à l’aise.
  • De manière globale, je suis toujours dans le questionnement ; « suis-je à la hauteur ? », « Est-ce que je n’outrepasse pas mon rôle ? », « Est-ce que ma présence est bénéfique pour la personne ? ». écouter, écouter vraiment n’est pas toujours évident.
  • Pour les familles c’est parfois plus facile de se confier à un bénévole plutôt qu’à un proche.
  • Il faut que, peu à peu, j’aille vers plus de dépouillement et que je mette moins mon mental et mes pensées entre le malade et moi.

Accompagner la fin de vie : témoignage d’une bénévole de l’association

« Je suis devenue bénévole d’accompagnement de personnes en fin de vie après avoir lu différents articles de presse concernant l’association Actes en Val de Drôme.
Dès que j’ai eu du temps disponible, je me suis présentée dans cette association. Pendant environ une année, j’ai participé à 3 week-ends de formation et j’ai pris part chaque mois à la réunion d’échange sur les pratiques des bénévoles, réunion animée par une psychologue. Au cours de cette période de formation, j’ai beaucoup appris. J’ai compris aussi que l’accompagnement des personnes en fin de vie ou gravement malades, qui souhaitent une présence, serait pour moi un vrai engagement.
Nous entourons de façon naturelle un enfant à sa naissance, de la même manière je souhaite à toute personne en fin de vie d’être bien entourée pour ce passage souvent difficile. J’ai eu la chance d’accompagner mon père pendant plusieurs mois au moment de sa fin de vie avec ma mère et mes frères et soeurs. Comme nous étions à l’écoute des uns et des autres, ce fut un temps bienfaisant, notamment parce que dans une telle situation nous sommes obligés de prendre du temps.
C’est cette richesse que je retrouve dans mon engagement avec l’association Actes en Val de Drôme. Par exemple, dans le service de l’Unité de Soins Palliatifs du centre hospitalier de CREST, je suis souvent surprise de l’accueil offert par les personnes en fin de vie. Certaines me font témoin d’une part de leur vie. Il y a parfois des moments magiques : un regard échangé qui en dit beaucoup plus que milles phrases, un geste qui exprime quelque chose d’important, une acceptation, un amour ou un lien réciproque, une compréhension de l’un à l’autre, sans mots.
Un autre aspect de la richesse de cet engagement, ce sont les partages que nous avons entre bénévoles : lors de la rencontre mensuelle, chacun apporte son témoignage, ses difficultés, ses questions. Avec l’aide de la psychologue nous tentons d’être le mieux possible à notre juste place dans les accompagnements. C’est un plaisir d’avoir dans cette association des échanges souvent humainement très riches. »

Interview d’un bénévole par Pierre Brunet, journaliste au Crestois.

Le Crestois : Expliquez-nous tout d’abord ce qu’est votre association.
L’association intervient à la demande des équipes soignantes non seulement auprès des malades, mais aussi de leur famille et de leurs proches. Nous comptons actuellement 40 membres et 10 accompagnants et opérons à Crest, Die, en maison de retraite ou directement à domicile. Actes a également pour but de répondre au «déni de mort » que l’on connaît dans notre société civile actuelle.
Que voulez-vous dire par là ?
De nos jours, il faut être beau, musclé, bien portant, et tout va bien. Mais quand on est moins bien, et encore plus lorsqu’on est au seuil de sa mort, on a tendance à l’occulter voire même à le cacher. Notre rôle est donc de taire en sorte que la mort soit considérée comme un acte de vie naturel, tout comme la naissance.
Comment fonctionne Actes en Val de Drôme ?
Notre association est totalement indépendante, apolitique et aconfessionnelle.
Les bénévoles reçoivent des formations trois fois par an, pour améliorer, toujours, leur capacité d’écouter et de recevoir !es messages. Nous sommes dans «l’être», pas dans le «faire». Nous ne prodiguons aucun soin, n’émettons aucun avis sur ce que l’on entend, et avons un engagement de confidentialité. Notre rôle est d’être à côté du patient.
Comment gère-t-on, soi-même, de telles situations ?
Nous avons, chaque mois, une réunion de groupe pour vider notre sac, et voyons une psychologue professionnelle. Nous travaillons beaucoup sur nos ressentis physiques, psychologiques et mentaux. C’est très important car naturellement, comme tout le monde, nous devons faire face à nos angoisses. Mais le but est de grandir de ces accompagnements, pour être toujours plus à l’écoute. Il est vrai que cela peut être parfois très dur, suivant les maladies, mais il faut toujours rester conscient que nous ne sommes, nous-mêmes, à l’abri de rien, pour s’abstenir de tout jugement.
Comment devient-on accompagnateur ?
Bien souvent parce que l’on est touché soi-même par le problème.
Doit-on avoir un «don» spécifique pour se lancer ?
Non, non, pas du tout. Il suffit d’avoir la volonté d’écouter ces personnes qui se trouvent dans une situation difficile. Les gens qui se présentent passent alors un entretien avec deux bénévoles puis rencontrent notre psychologue. Après qu’on leur a expliqué tous les aspects de la démarche, elles assistent à nos groupes de paroles, suivent les formations, puis enfin débutent auprès des patients, en binôme avec un accompagnateur chevronné. Il faut entre huit et quinze mois, en général, pour terminer le cheminement normal.
Quel cadre entoure l’association ?
Nous adhérons à la Société Française d’Accompagnement et de Soins de Palliatifs
(SFAP) et notre mission est de faire connaître les possibilités qu’ont les personnes en fin de vie dans le cadre de la loi. à ce sujet, la loi Léonetti de 2005 est une grande avancée pour la France, pays plutôt considéré comme «en retard» par rapport aux autres. Elle a placé le patient au centre des préoccupations et mis les soignants et les civiles, comme les accompagnants ou les psys, côte à côte.
Sa grande force réside en cinq points :
– le droit à l’accès aux soins de confort jusqu’à la fin de sa vie
– le droit de supprimer la douleur à tout prix, au risque d’abréger la vie, appelé la sédation double effet.
– le droit d’interrompre ou de refuser tout traitement qui prolongerait artificiellement la vie
– les directives anticipées et la désignation d’une personne de confiance : le droit au respect, par le médecin, de la volonté du patient en fin de vie. Il faut que ces décisions soient prises dans un moment de conscience. Le problème qui se pose, à l’heure actuelle, est que très peu de médecins connaissent cette loi, et n’en parlent donc pas à leurs patients qui pourraient anticiper toutes ces décisions.
Quelles sont ces possibilités ?
Et bien il faut prendre ses dispositions lorsqu’on est en bonne santé, comme lorsqu’on déclare accepter que l’on prélève nos organes en cas d’accident. Ces dispositions, que l’on doit faire connaître, doivent être renouvelées tous les trois ans. On désigne alors une personne de confiance qui nous représentera au cas où l’on ne puisse plus, soi-même, prendre les décisions. On peut ainsi décider de ne pas subir de chimiothérapie, de trachéotomie, d’être simplement ventilé, etc.